« Un rétablissement de la viabilité des finances publiques, une gestion prudente de la dette et la disponibilité de denrées alimentaires essentielles à des prix abordables pour les populations vulnérables seront nécessaires pour atténuer les risques ».
En Tunisie, la croissance du PIB devrait s’établir à 2,5 % en 2022 et 3,2 % en 2023, sous l’effet de la relance des secteurs touristique et industriel, selon le rapport sur les Perspectives économiques en Afrique du Nord 2022 de la Banque africaine de développement, rendu public à Tunis.
La BAD estime que cette reprise de l’activité économique n’est cependant pas suffisamment robuste pour retrouver les emplois perdus depuis le début de la pandémie de Covid-19. Les projections réalisées montrent qu’il est nécessaire d’améliorer le climat des affaires et de stimuler la concurrence afin d’accélérer la reprise des investissements privés. Un rétablissement de la viabilité des finances publiques, une gestion prudente de la dette et la disponibilité de denrées alimentaires essentielles à des prix abordables pour les populations vulnérables seront nécessaires pour atténuer les risques.
Toujours selon le rapport, la reprise enregistrée en 2021 en Tunisie a été stimulée par l’industrie manufacturière et les services. Le choc lié à la pandémie mondiale en 2020 a provoqué une grosse récession en Tunisie avec une réduction du PIB de 8,7 %.
L’année 2021 a été marquée par une embellie importante avec une croissance du PIB de 3,4 %. Cette reprise, associée à l’amélioration des performances des secteurs de l’industrie et des services, a favorisé une augmentation des exportations. La demande totale a connu une hausse, en partie grâce à une poussée de 24,5 % des investissements du secteur privé, après une contraction de 26,8 % en 2020.
Afrique du Nord : la croissance économique se situera à 4,5% en 2022 et 4,2% en 2023 (BAD)
De façon générale, la croissance économique dans la région de l’Afrique du Nord se situera au niveau de 4,5% en 2022 et aux alentours de 4,2% en 2023, a indiqué l’économiste régionale pour l’Afrique du Nord à la Banque africaine de Développement (BAD), Audrey Verdier-Chouchane, lors d’un webinaire organisé par le Bureau régional de la BAD, à l’occasion du lancement de l’édition 2022 du rapport «Perspectives économiques en Afrique du Nord».
Ce rapport, placé cette année sous le thème : « Soutenir la résilience climatique et une transition énergétique juste», offre une vue d’ensemble des économies nord-africaines, en proposant une approche régionale du développement.
Chouchane a souligné que les économies nord-africaines font face, ces dernières années, à plusieurs difficultés, dont l’aggravation du déficit des comptes courants, dont la moyenne est estimée à 4,1% dans la région, et aussi du déficit budgétaire, notamment dans les pays où les produits alimentaires et énergétiques sont subventionnés par l’Etat, à l’instar de la Tunisie, l’Algérie et la Libye, et ce, au vu de la flambée des prix de ces produits à l’échelle internationale.
Toutefois, l’économiste a noté que l’Afrique du Nord se présente comme la région la plus résiliente dans le continent africain face aux changements climatiques, malgré le manque de financements alloués à cette problématique. « L’enveloppe mobilisée durant la période 2010- 2020 au profit de la région pour faire face aux changements climatiques n’a pas dépassé les 3,1 milliards de dollars », a indiqué Chouchane, estimant que l’ensemble des besoins financiers pour la décennie 2020-2030 devrait atteindre les 360 milliards de dinars.
De son côté, Emmanuel Pinto-Moreira, directeur des économistes-pays, a fait savoir que l’Afrique fait face à trois grands défis. Il s’agit, primo, de l’inflation, qu’il a qualifiée de « phénomène mondial, engendré, essentiellement, par le dérangement de chaînes d’approvisionnement durant la période de propagation de la pandémie, la guerre russo-ukranienne qui a entraîné l’envolée des prix des céréales, la hausse de la demande globale aux quatre coins du monde, et le cercle vicieux ‘’hausse des salaires-hausse des prix’’, qui s’est installé dans la majorité des pays».
Secundo, il y a l’endettement, aggravé par les politiques budgétaires inadéquates adoptées par les gouvernements africains. « L’endettement a dépassé les 70% du PIB global du continent en 2021 », a-t-il précisé, considérant que les mécanismes mis en place pour atténuer cette situation, que ce soit à l’échelle locale ou mondiale, n’ont pas prouvé leur efficacité.
Tertio, il y a les changements climatiques, qui impactent de plus en plus le secteur agricole « bien que le continent ne soit responsable que de 4% des émissions de carbone à l’échelle mondiale ».
Dans ce cadre, les deux responsables ont souligné l’impératif de mobiliser les moyens financiers nécessaires afin d’aider les pays africains à surmonter les répercussions des changements climatiques et à réussir une transition vers un nouveau modèle de développement durable, et ce, en investissant davantage dans les énergies renouvelables (solaire, éolienne…).
Ils ont recommandé aussi de favoriser le développement du secteur privé, afin d’assurer la relance de la croissance, qui demeure en berne ces dernières années, et de favoriser la création d’emplois, surtout au profit des jeunes diplômés.
Par ailleurs, ils ont préconisé de mobiliser la dette pour financer les investissements productifs, ce qui permettra d’impulser une croissance économique soutenable à long terme.